Histoire

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Histoire du château de Rambouillet

Photo du château depuis les jardins. On y aperçoit de beaux parterres fleuris

Rambouillet est l'exemple unique d’un château qui a connu à la fois l’Ancien Régime, l’Empire et la République.

Rambouillet, résidence des présidents de la République

Découvrir l'histoire du château, c’est entrer dans l’intimité de l’un des séjours favoris des princes, rois et présidents depuis près de six siècles. Mais le château de Rambouillet est avant tout connu pour son histoire récente. Celle de l'occupation présidentielle qui vient tout juste de prendre fin !

Jalousement tenus secrets pendant de nombreuses années, certains espaces privés ouvrent peu à peu au public, levant le voile sur les secrets de leur histoire. Saviez-vous, par exemple, que plus de la moitié des présidents de la République ont séjourné ici ?  

Tout commence en 1895 lorsque Félix Faure, président sous la IIIe République, décide de faire de Rambouillet une résidence estivale. Véritable havre de paix, le lieu est idéal pour combiner vie de famille et rencontres diplomatiques de haut vol, dans un style décontracté.

Photographie prise depuis le balcon de l'aile ouest du château, avec vue sur les canaux du Jardin à la française
Vue sur le Jardin à la française depuis le balcon de l'aile ouest

© Laurent Gueneau / CMN

Pouvez-vous imaginer toutes les confidences échangées ici ? Chefs d’État étrangers ou têtes couronnées, nombreuses ont été les personnalités invitées à Rambouillet : de David D. Eisenhower à John F. Kennedy, de Nikita Khrouchtchev à Mikhaïl Gorbatchev, de l’Empereur du Japon à la reine Elisabeth II. 

C’est aussi à Rambouillet que le président Giscard d’Estaing choisit d’organiser, en 1975, le premier G6 de l’Histoire qui a réuni les chefs d’État des 6 pays les plus industrialisés ! 

Toutefois, les présidents n’ont pas "inventé" Rambouillet. Ils se placent au contraire dans une longue tradition d’occupation… Remontons le temps ! 

Vincent Auriol, le prince Philip, duc d’Edimbourg, la reine Juliana des Pays-Bas et le prince Bernhard des Pays-Bas dans les jardins de Rambouillet avec le château en arrière plan le 18 octobre 1952
Vincent Auriol, le prince Philip, duc d’Edimbourg, la reine Juliana des Pays-Bas et le prince Bernhard des Pays-Bas à Rambouillet le 18 octobre 1952

© Archives nationales

Entre ville et forêt : un site qui attire dès le Moyen Âge

Il faut bien l’avouer : le lieu a tout pour plaire ! Situé dans les Yvelines, à une cinquantaine de kilomètres de Paris, Rambouillet est tout d’abord facile d’accès. Ni trop loin, ni trop proche, c’est un refuge parfait pour goûter un peu de quiétude à l’écart du pouvoir. Ajoutons à cela la présence de l’une des plus belles forêts d’Ile-de-France réputée pour la qualité de sa chasse et nous comprenons alors pourquoi le séjour de Rambouillet était tellement prisé !  

Le premier à percevoir l’exception du lieu s’appelle Jean Bernier. Conseiller du roi Charles V, il acquiert ici en 1368 un petit manoir qu’il transforme en château fort. Nous sommes alors en pleine guerre de Cent Ans et les Anglais ne sont pas loin...

Vue aérienne sur le château et la ville de Rambouillet toute proche. On y aperçoit le réseau de canaux du jardin français et le long bâtiment des communs du XVIIIe siècle.
Château de Rambouillet, vue aérienne depuis le nord

© 4vents / CMN

Vers la fin du XIVe siècle, Rambouillet est acquis par la puissante famille d’Angennes. Le château est peu à peu transformé en une demeure de plaisance où il fait bon vivre. Il reste dans la famille pendant près de trois siècles !

LA personnalité de la famille qu’il faut retenir ? Catherine de Vivonne (1588-1665), épouse de Charles d’Angennes, grande figure des "Précieuses"  .

Le saviez-vous ? Le roi François Ier est mort au château de Rambouillet. De santé fragile, il est pris de malaise au cours d’une chasse près de Rambouillet. Son ami, Jacques d’Angennes, le ramène en hâte au château pour le soigner. En vain : il y rend son dernier souffle dans la nuit du 30 mars 1547

Portrait de François Ier réalisé par le peintre Jean Clouet.
François Ier, roi de France. Jean Clouet

© RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michel Urtado

Évolution architecturale du château du Moyen Âge au début du XVIIIe siècle

Rambouillet, une histoire de convoitise

Au tournant du XVIIe siècle, le dernier héritier de la famille d’Angennes, assailli de dettes, est contraint de céder le château et les terres environnantes à son principal créancier : Joseph-Jean-Baptiste Fleuriau d’Armenonville, intendant des finances de Louis XIV. On dépense sans compter ! 140 000 livres puis 500 000 autres sont investies pour l'aménagement d'un jardin à la française ! Une somme colossale pour l’époque. 

Peut-être aurait-il dû s’abstenir, car un roi et son fils ont désormais le regard tourné vers Rambouillet... 

Château de Rambouillet, Jardin à la française

© 11H45 / CMN

La maison du comte de Toulouse, prince de sang

Face à Louis XIV et le comte de Toulouse, son fils légitimé   favori, Fleuriau d’Armenonville ne fait pas le poids... En 1704, il est prié de quitter les lieux !  

Devenu la résidence d’un prince de sang, le château fait l’objet de travaux d’embellissement confiés aux meilleurs artisans du moment, venus du chantier de Versailles bien sûr. À la différence des d’Angennes, le comte de Toulouse en fait son principal lieu de vie, loin des intrigues de la cour.

Un mariage d’amour au XVIIIe siècle pour le fils d’un roi, vous y croyez ?

Il a lieu en 1723, en grand secret. L'élue s’appelle Marie-Victoire-Sophie de Noailles. Pour elle, rien n’est trop beau : le comte lui offre un somptueux appartement décoré de boiseries rocaille, l’appartement d’assemblée. En découle une vie de famille épanouie et discrète autour de leur unique fils, Louis-Jean-Marie, duc de Penthièvre.  

Portrait du comte de Toulouse par Hyacinthe Rigaud
Le comte de Toulouse, Hyacinthe Rigaud. XVIIIe siècle

© Hervé Lewandowski / CMN

Ces deux générations suffisent à faire de Rambouillet, selon les mots de Saint-Simon, une "terre prodigieuse" dans laquelle Louis XV vient régulièrement séjourner. 

Le duc de Penthièvre, dont la fortune est considérable, lance un nouveau chantier, dans le parc cette fois. Dans les années 1770, il y crée un Jardin anglais agrémenté de fabriques, comme la charmante Chaumière aux coquillages qui subsiste toujours. Le cœur de Rambouillet bat alors au rythme du siècle des Lumières ! 

D’un raffinement exquis, tout ici est à la dernière mode. Pour autant, Rambouillet demeure un château à taille humaine où il fait bon vivre à l’ombre du pouvoir. 

Dessin réalisé par Ozanne et présentant une vue du château depuis l'extrémité du canal. On y aperçoit des galants sur les berges et les gondoles sur les canaux
La gondole du duc de Penthièvre au château de Rambouillet. Détail du dessin "Louis XV et le duc de Penthièvre au Grand bassin de Rambouillet" par Nicolas-Marie Ozanne, dessin, 1764

© Reproduction Benjamin Gavaudo / CMN

Rambouillet devient propriété du roi !

Une histoire de convoitise disions-nous ? Louis XVI lorgne sur Rambouillet depuis bien des années... Il recherche un refuge pour se protéger de la pression de Versailles et s’adonner à sa passion pour la chasse en toute tranquillité ! Le duc de Penthièvre ne peut pas s’opposer à la volonté de son royal cousin... 

Le Roi achète donc le château en 1783, pour la somme de 16 millions de livres, soit 100 fois plus que Fleuriau d’Armenonville à peine un siècle plus tôt !  

Louis XVI en costume de sacre par Joseph Siffred Duplessis
Louis XVI en costume de sacre, Joseph Siffred Duplessis. Paris, musée Carnavalet

© RMN-Grand Palais / Agence Bulloz

Louis XVI commande l'aménagement, à Rambouillet, d'une ferme expérimentale pour accueillir un troupeau de moutons mérinos importé d'Espagne. 

Les jardins servent de pépinière pour tester l’acclimatation des espèces issues des voyages botaniques ! Ouvrez l’œil lors de votre prochaine visite : cyprès chauves, tulipiers de Virginie, ginkgo biloba et bien d’autres ornent encore le parc de Rambouillet.  

Photographie présentant des brebis mérinos dans le Jardin anglais.
Brebis mérinos dans le Jardin anglais

© Bergerie Nationale

Seul "hic" dans l’histoire ? Son épouse Marie-Antoinette n’aime pas Rambouillet. Pourtant Louis XVI lui a réservé une belle surprise : une superbe laiterie et sa ménagerie  , spécialement conçues pour elle par le célèbre peintre Hubert Robert. 

Mais rien n’y fait : le Trianon du château de Versailles fait son bonheur ! 

Photographie de l'intérieur de la Laiterie. On y aperçoit la salle de dégustation et en arrière plan la fameuse grotte de la salle des fraicheurs
Laiterie de la Reine, salle de dégustation

© Colombe Clier / CMN

Napoléon à Rambouillet

En 1804, Napoléon prend possession d'un château en bien mauvais état, endommagé par la Révolution. D’importants travaux sont alors engagés. L’Empereur veut faire de Rambouillet un lieu de repli où il pourra vivre simplement, entouré des siens entre deux campagnes militaires. 

Les travaux réalisés à cette époque modifient à tout jamais l’aspect du château : une aile est détruite à la dynamite ! La façade est redessinée et un nouvel appartement est aménagé pour l’Empereur.  Les jardins ne sont pas oubliés : près de 40 000 arbres sont plantés. 

Napoléon se plaît à Rambouillet. Il y vient très régulièrement et s'attache au personnel du lieu : pour preuve, le concierge du château aura même sa place dans son testament ! 

Vous souhaitez en apprendre plus sur la vie de Napoléon à Rambouillet ? Lisez notre article dédié.

Vue de l'intérieur de la salle de bains de l'Empereur avec ses chaises et son méridien au premier plan, suivi de la baignoire en cuivre au fond. Le mur est un décor peint avec des motifs  néo-classiques.
Salle de bains de l'Empereur restaurée

©Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux

L' abdication de Charles X à Rambouillet

Lorsque la monarchie est restaurée en 1815, Louis XVIII réinvestit le château de Rambouillet et y engage quelques travaux.  

Son frère et successeur, Charles X, est très attaché au lieu pour y avoir souvent chassé à l’époque de Louis XVI. Il y trouve refuge avec sa famille à la suite des Trois Glorieuses (journées révolutionnaires du 27, 28 et 29 juillet 1830). Et c’est ici qu’il renonce au trône, le 2 août 1830. 

Dessin sur lequel on aperçoit Charles X  présentant le comte de Chambord à la Garde Nationale devant la cour du château de Rambouillet
Charles X présentant, après son abdication, le comte de Chambord à la Garde Nationale. Anonyme. Versailles, châteaux de Versailles et de Trianon

© RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / image RMN-G

La décadence... et le sauvetage !

Le nouveau roi, Louis-Philippe, ne s’intéresse pas du tout au château de Rambouillet qui est alors proposé à la location jusqu’à ce que Napoléon III, indigné par le sort réservé à l’un des séjours favoris de son oncle, décide de le restaurer puis d’y loger sa cousine.  

L’histoire du château aurait pu s’arrêter au lendemain de la chute du Second Empire... Mais, nouveau rebondissement : quoi de mieux que Rambouillet pour servir de résidence présidentielle

Vous souhaitez en savoir plus sur cette nouvelle page de l’histoire du château ? Revenez tout en haut de cette page, remontez jusqu'au premier paragraphe !

Photo d'archive avec le château en arrière plan. De Gaulle et Eisenhower sont salués par la Garde Républicaine.
Charles De Gaulle et Dwight D. Eisenhower au château de Rambouillet, septembre 1959

© Archives nationales

Une nouvelle ère pour le château

Le Centre des monuments nationaux qui gère Rambouillet depuis 2009 restaure et met en valeur ce patrimoine exceptionnel. L’abandon de l’usage officiel du château va permettre d’ouvrir au public de nouveaux espaces jusqu’alors réservés au président et à ses invités !  

Derrière une architecture fortement remaniée, se cachent des décors exceptionnels qui font de Rambouillet un formidable conservatoire des styles, du goût et des modes. Donnons l'exemple de la salle de bains du comte de Toulouse ou encore, plus surprenantes, les chambres des invités et leur décor moderniste des années 50 sur décision du président Auriol ! 

Fermées au public durant de longues décennies, ces salles seront peu à peu restaurées pour retrouver tout leur lustre. L’objectif ? Révéler enfin les coulisses de la vie de ses glorieux habitants, qu’ils furent princes de sang, rois, empereurs ou présidents de la République ! 

Un groupe de visiteur découvre le studio du chef d'Etat étranger, expliqué par un guide conférencier
Visite guidée dans l'appartement des chefs d'État étrangers

© Château de Rambouillet / CMN

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