Art & Architecture
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Le XVIIIe siècle est marqué par un véritable engouement pour tout ce qui a trait à l’Antique. De ce goût nouveau naît un style artistique appelé “néoclassicisme”. Au-delà des arts, cette mode s’invite également dans le quotidien de l’aristocratie à travers le mobilier, les vêtements, la vaisselle. Rambouillet, domaine des chasses et refuge intime des cours de Louis XVI et Napoléon, incarne parfaitement cette fascination.
Au XVIIIe siècle, le Grand Tour est une institution pour parfaire l'éducation des jeunes aristocrates. Ce voyage à travers plusieurs pays européens peut durer plusieurs années, le temps de découvrir la culture et la langue des pays visités, mais également les fouilles archéologiques en cours.
À cette époque, les découvertes des cités antiques de Herculanum (1709) et de Pompéi, passionnent l'Europe entière ! La mise au jour de vestiges et de mobiliers antiques attisent la curiosité et la passion des élites, des artistes et des scientifiques. Ils profitent de leur voyage pour rapporter de nombreux souvenirs (portraits, dessins, maquettes...) des villes et des sites archéologiques visités, contribuant à leur tour à l'engouement des Européens pour l'Antiquité.
Un petit temple pour Marie-Antoinette
Construite à la demande de Louis XVI pour Marie-Antoinette entre 1786 et 1787, la Laiterie de Rambouillet s'inscrit dans la politique de renouvellement esthétique menée par le comte d'Angiviller.
Directeur des bâtiments du roi, il est un ardent promoteur de la nouvelle esthétique fondée sur l'Antiquité ! Et pour preuve, tous les artistes sollicités sur le chantier de Rambouillet sont imprégnés par ce goût nouveau : le peintre Hubert Robert chargé de la conception de la Laiterie, l’architecte Jacques-Jean Thévenin ou encore le sculpteur Pierre Julien. Tous, sans exception, ont été formés en Italie.
La Laiterie de la Reine prend ainsi la forme d’un véritable temple avec ses colonnes baguées et son fronton à arc surbaissé. La pureté des lignes et le dépouillement de l’architecture sont caractéristiques du mouvement néoclassique. À l’intérieur, elle se compose de deux salles.
La première, dédiée à la dégustation des produits laitiers, rappelle le Panthéon de Rome avec son plan circulaire, sa coupole à caissons et son éclairage zénithal. Quatre médaillons sculptés par Pierre Julien ornent la salle. Ils présentent des jeunes femmes vêtues à l’Antique et pratiquant des activités propres à la ferme (tonte du mouton, traite de la vache, …).
La seconde salle suscite l’émerveillement. De plan rectangulaire, couverte d’une voûte en berceau à caissons, elle ouvre sur une grotte assurément signée Hubert Robert, dans laquelle de l’eau s’écoulait.
La grotte est un thème récurrent du répertoire néoclassique. Elle évoque le sanctuaire des nymphes, tout droit sorti des mythes gréco-romains !
À l’intérieur de la grotte s’élève une ronde bosse signée Pierre Julien et représentant Amalthée et la chèvre de Jupiter.
De part et d’autre de la pièce, deux longs panneaux sculptés en bas et hauts reliefs illustrent également deux scènes tirées de la mythologie : Jupiter enfant chez les corybantes et Apollon gardant le troupeau d’Admète.
Le service de Sèvres
Hubert Robert et Jean-Jacques Lagrenée, deux peintres renommés, ont dessiné pour la Laiterie un service de porcelaine réalisé par la manufacture de Sèvres. Leurs dessins et motifs sont inspirés des pièces étrusques tout juste rapportées d’Italie par Vivant Denon, diplomate et premier directeur du futur musée du Louvre, qui, faute de place, les a fait entreposer à la Manufacture. C’est ainsi que sont créées près de soixante-cinq pièces dont des seaux à lait (imitant parfaitement les habituels seaux en bois), des coupes, des tasses et un bol en forme de sein.
Le mobilier
Pionnier du style néoclassique dans le mobilier, Georges Jacob réalise pour la Laiterie de Rambouillet un ensemble de sièges, fauteuils et tabourets en acajou dans le plus pur style étrusque, sur les dessins d’Hubert Robert.
Il parachève ainsi ce véritable temple dédié au lait : immersion garantie au cœur d'une Antiquité revue par le XVIIIe siècle !